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Diana Mori : La revanche d’une femme Shipiba du Pérou

L’éducation est un facteur d’émancipation et de conquête des droits de la femme . Diano Mori en est le symbole. Elle est aujourd’hui  la première femme autochtone élue dans la région et représente les peuples autochtones au gouvernement régional d’Ucayali.

Son histoire force le respect

Mon histoire est une histoire de lutte constante et de résistance. 

Nous avons vécu des événements dans ce pays , nous avons été tués. 

Note de l’auteur : le parti communiste- sentier lumineux a semé la terreur dans les années 80 et 90 et a fait plus de 70000 victimes.

Mais malgré ces difficultés nous avons appris à survivre. 

Ils ont peut être voulu nous exterminer, mais ils ne pourront jamais nous exterminer parce que nous sommes forts et que nous les femmes, sommes capables de rassembler des régions, des villages et des communautés.

Mon nom est Diana Mori Gonzales, je suis une shipiba coniba de la région d’Ucayali au Pérou. 

Je suis née dans la jungle Patria Nueva où il lui suffisait de monter aux arbres pour avoir de quoi manger.

J’ai été la première femme élue dans la région, la première femme fonctionnaire du pays, et je suis la représentante régionale des peuples indigènes .

J’ai le sentiment d’avoir plusieurs  missions à accomplir .

Je suis née dans une famille de douze hommes. Nous étions treize enfants. 

Dans la culture shipiba, les hommes sont ceux dont on s’occupe le mieux. Les garçons  en sortant de l’école passent à table, alors que les filles doivent d’abord cuisiner, laver les plats avant d’espérer manger. De même le meilleur poisson est-il toujours réservé à l’homme et non à la femme. 

Pourquoi?

Parce que, disent-ils, les femmes, dès 14 ou 15 ans, tombent enceintes et ne peuvent plus aller à l’école. Les parents privilégient donc les garçons dès l’enfance.

J’ai pu m’en rendre compte dans ma propre famille. Cela m’a rendue plus forte et m’a permise de tenir tête à ma propre mère ou à mon propre père. je leur parlais librement sans avoir peur.

Finalement être la seule fille m’a rendue beaucoup plus courageuse .

Pendant la période difficile de ma vie qui a été celle du terrorisme au Pérou, j’ai vu des personnes habillées en noir (cf le sentier lumineux), enlevées des petits garçons et des petites filles pour les envoyer dans une école, avec un enseignement et une méthodologie propres, et je n’ai jamais pu l’accepter. Mes trois frères sont morts et je suis la seule à avoir survécu à l’enlèvement .

A partir de ce jour, j’ai senti que j’avais un rôle important à jouer,  je devais m’occuper de mes autres frères, les plus jeunes. Mon devoir était de les protéger, et finalement, je suis devenue une femme, alors que j’étais encore une toute petite fille.

Adolescente, j’ai été victime d’un viol et un enfant, qui plus une fille ,est née.

C’est la raison pour laquelle je dois lutter davantage pour qu’elle puisse vivre dans un monde meilleur.

L’histoire des femmes indigènes doit changer.

Ce monde brutal, il faut que nous les femmes Shiiba, nous l’affrontions, non seulement à la maison, mais aussi dans la société, et que nous brisions les barrières et les stéréotypes.

Nous devons lutter contre les modèles culturels, sur les questions de genre, de race,  d’économie et de culture.

La tâche est multiple. 

Mais nous continuons à résister tant que nous le pouvons et que notre cœur tient bon.

Par exemple, j’ai dû redoubler d’efforts pour pouvoir aller à l’école. Je devais me lever tôt, travailler pour pouvoir étudier. 

Quand je suis arrivée à l’école en 1993, je ne comprenais rien parce que les cours étaient en castillan. J’ai appris à lire, j’ai appris le castillan, et j’ai appris les deux cultures très différentes.

Mais il n’y a pas de portes fermées, le monde n’est pas fermé. Il ne faut jamais se résigner. 

Il y a des portes que l’on doit ouvrir soi-même avec sa propre force.

Et c’est ce que je fais. Je suis une femme de défis.

Rien n’est impossible, tout est à construire .

J’ai pu étudier la littérature et devenir institutrice. L’accès à l’éducation supérieure des femmes est une grande avancée. Mais c’est aussi une responsabilité d’être leader ou maîtresse parce nous sommes des modèles .

L’éducation permet de nous affranchir, de devenir meilleur et de conquérir nos droits.

C’est ma mission pour les femmes d’ici et du monde. 

Et je leur dis: “luttons pour obtenir le meilleur pour nos enfants, pour que ce monde soit égalitaire et que le monde vive en paix”

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En terre indigène