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Porter atteinte à la terre, c’est porter atteinte au corps des femmes autochtones

L’édition 2022 du Festival America à Paris donne la parole aux femmes autochtones. Celles-ci, particulièrement légitimes pour s’exprimer sur ces sujets, n’hésitent pas à faire converger leur lutte contre la destruction de l’environnement et celle pour le droit des femmes.

“Défenseurs de l’environnement” et “Gardiens de la Terre”, tels sont les noms des conférences organisées par le Festival America cette année, laissant une place conséquente aux artistes amérindiens engagés pour la préservation de l’environnement. Mais pas uniquement. Du 22 au 25 septembre à Vincennes (Paris), les femmes autochtones sont particulièrement mises en avant et plusieurs conférences leur ont été entièrement dédiées.

Elles sont pourtant loin d’être cantonnées à s’exprimer sur ce thème et certaines diversifient leurs interventions, à l’image d’Angeles Cruz. Dans un récent long-métrage, l’actrice et réalisatrice mexicaine a dénoncé le machisme opérant au sein d’une communauté autochtone. Elle interviendra lors d’une conférence intitulée “La Voix des femmes”, mais participera également à une rencontre sur la défense de l’environnement. Elle y échangera notamment avec Tara Houska, avocate de la Première Nation Couchiching et ancienne conseillère de Bernie Sanders. Celle-ci a créé un groupe de résistance de femmes indigènes, tout en luttant contre l’installation de pipelines dans le Dakota du Nord.

Colonialisme, capitalisme, extractivisme

Comme d’autres, ces femmes ont réuni deux combats en apparence distincts jusqu’à l’apparition récente du terme “écoféminisme”. Aux mêmes causes, les mêmes solutions. Des causes historiques relevant du colonialisme, du racisme et des inégalités territoriales peuvent en effet expliquer que les femmes autochtones se trouvent en première ligne face au changement climatique et subissent une double marginalisation. 

Des études ont par exemple prouvé que les conséquences du colonialisme, en plus d’avoir déstructuré des communautés jadis matrimoniales, ont entretenu de grandes inégalités entre femmes autochtones et allochtones, se traduisant par des taux plus élevés de violences et par des revenus moindre. 

D’après le Women’s Earth Alliance, des pratiques capitalistes comme l’extractivisme, accroissent la violence environnementale et impactent les femmes autochtones de multiples manières. Des conséquences incluant notamment la migration des toxines environnementales dans le placenta et par l’allaitement, les risques accrus de complication durant la grossesse et l’augmentation de la violence domestique. 

Dans cette logique, Kandi Mosset, une amérindienne originaire du nord du Dakota qui consacre sa vie à la lutte environnementale et fait elle aussi le parallèle entre son corps et celui de sa terre. “Laisser l’industrie fossile empoisonner les terres, c’est nous empoisonner nous-mêmes”, avait déclaré la lanceuse d’alerte à notre micro (son portrait est à retrouver ici, ainsi que celui d’autres femmes autochtones impliquées dans la lutte pour la préservation de la planète : https://femmesautochtones.com/la-voix-de-la-nature)

Les femmes autochtones “veulent être consultées”

Longtemps exclues des décisions politiques, leurs responsabilités au niveau local les dotent pourtant de connaissances approfondies sur l’environnement. Que ce soit à l’écrit ou à l’oral, sur les réseaux sociaux, devant les tribunaux ou face aux dirigeants politiques, les femmes invitées pointent toutes du doigt la relation étroite qu’elles entretiennent avec la Terre-mère, qui a contribué à construire leur identité. 

C’est pourquoi, comme l’indique Suzy Basile, première personne de la nation Atikamekw à obtenir un doctorat, les femmes autochtones « veulent être consultées, écoutées, entendues et participer activement aux prises de décisions portant sur le territoire et son développement. »Le Festival America sera l’occasion pour ces femmes, premières victimes et premières engagées, de partager leurs expériences, leurs préoccupations et leurs pistes de réponse.

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